mardi 17 mars 2015

Edmond Michelet = Saint Louis

Michel Cool publie chez Salvator un nouvel ouvrage intitulé "La Nouvelle Légende Dorée" et sous-titré "52 saints pour aujourd'hui". En référence à "La Légende Dorée" de Jacques de Voragine, dominicain, qui au XIIIe siècle relata la vie de cent-cinquante-trois saints. 
Seulement, les 52 "saints" de Michel Cool ne sont pas (encore ?) des saints. Certains ne sont pas catholiques et certains, même, ne sont pas croyants. Et à côté de personnalités incontestables, figurent d'autres beaucoup plus contestables. Son ouvrage est de la même veine que ceux de Jean Peyrade, "Figures catholiques du XXe siècle", et de Jérôme Cordelier, "Rebelles de Dieu". Ouvrages sympathiques par bien des côtés, mais tellement superficiels : quelques pages pour présenter une biographie, une personnalité et sa spiritualité, forcément schématiques. Une originalité pour l'ouvrage de Cool, il classe ses "saints" selon les béatitudes.

Michel Cool consacre quatre pages à Edmond Michelet qu'il enrôle sous "Heureux les doux : ils auront la terre en héritage". Il n'oublie aucun des poncifs relatifs à Edmond Michelet. Il y ajoute sa note et lui trouve même de nombreux points communs avec Saint Louis.        Michelet et Saint Louis ! 

Notons les erreurs factuelles : Edmond Michelet n'a pas démissionné du ministère de la Justice en août 1961; De Gaulle a tranché entre Michel Debré et lui et a choisi Debré. Michelet en a été hors de lui : "Debré a eu ma peau", confie-t-il à Louis Terrenoire. 
Cool écrit : "Il proteste à l'époque contre la répression organisée par Maurice Papon, le préfet de Paris, contre les partisans de l'indépendance algérienne qui manifestent dans les rues de la capitale." Il n'y a pas eu de manifestations pour l'indépendance de l'Algérie dans les rues de Paris quand Michelet était ministre de la Justice. La manifestation organisée par le FLN algérien dans Paris (qui donne lieu à une désinformation extravagante) date du 17 octobre 1961. Et Papon n'est pas préfet de Paris, mais préfet de police de Paris.
Mais ce qui frappe, ce sont les omissions. Comme toujours quand il s'agit d'hagiographes d'Edmond Michelet. 
Rien sur le rétablissement de la peine de mort en matière politique abolie depuis 1848. 
Rien sur la peine de mort réclamée contre les généraux Challe et Zeller. Rien sur sa hargne contre les partisans de l'Algérie française et contre ses anciens camarades du gaullisme, Jacques Soustelle et Louis Vallon, ou de la démocratie chrétienne, Georges Bidault et Alain Poher. 
Rien sur son silence lors du massacre des harkis alors qu'il préside France-Algérie. 
Il reste dans le gouvernement qui approuve en 1967 la loi Neuwirth sur la "prophylaxie anticonceptionnelle" contraire à l'enseignement constant du Magistère de l'Eglise.
Voilà le "saint", le "doux" que Michel Cool propose à notre dévotion. On reste ébahi par la mythologie bâtie autour d'un homme qui, il est évident, avait une foi profonde mais qui, dans sa vie publique d'homme politique, ne se différenciait nullement de ses collègues députés, sénateurs ou ministres. Rien ne vient étayer le fait qu'il y ait agi "en chrétien".
Il faut dire que la bibliographie citée par Michel Cool ne brille pas par sa diversité : trois ouvrages écrits par des membres de la famille Michelet. Rue de la Liberté d'Edmond Michelet, Prier à Rocamadour avec Edmond Michelet de Denis Rey (son petit-fils), A la recherche d'Edmond Michelet d'Agnès Brot (sa petite-fille).

Souhaitons que les autres personnalités retenues par Michel Cool pour son ouvrage soient traitées avec plus de rigueur historique que Michelet !